LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

LE SONGE DE L'AVIATEUR, piste 5

 

 

Sommaire

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Rester là

 

 

L'horizon, toujours présent et solide.
Regarde le, il est capable de fracasser nos têtes en bois et de laisser entrer le vent. Celui qui rince et nettoie. 
Il suffit d'un moment. De rester là à voler quelques minutes. Hors la ville. Ce flirt avec l'éternité, je le vis le plus souvent en fin de journée. Après nos combats ordinaires.

Échapper au tunnel de l'action, prendre le temps de garer la bagnole et d'inspirer tout ce que le monde nous offre. Il le fait ici en silence et en permanence. Généreusement. C'est un spectacle gigantesque et totalement gratuit. Il suffit de s'arrêter. Avec la rumeur des villages et le souffle de la circulation au loin. Un avion, parfois. Un petit animal dans les buissons, quand on a de la chance. Et l'hiver le crépuscule se pointe plus vite.

 

Ça s'écoute.

Ça peut durer un peu.

Tiens, ça donnerait presque envie de chialer un bon coup de se retrouver comme ça. Aussi nu et vrai. Sans le jeu ni l'armure. Juste là, dans le courant du vent et des nuages avec comme seul ami ce peintre ivre qu'est le soleil lorsqu'il se couche dans ses dernières éclaboussures. Il me fait du bien celui-là. Avec son sens du paysage enflammé ou doré à souhait. Je ne m'arrête jamais sous la pluie ou un ciel Baudelairien. Il faut que ça joue et que ça contraste au loin pour que je me pose un moment.

 

Avant j'aurais fumé une clope, mais là j'ai arrêté. Alors je regarde.

Je n'attend rien ni personne. Je suis là, posé dans le paysage. Je prends ma leçon d'attente. Je guéris un instant de l'agitation. Lorsque s'efface le dérisoire qui fait loi. Ici, en ce moment précis. Tout est là. Tout et rien d'autre.

 

Ça se sent et ça se respire.

C'est le monde libre. Sans l'existant qui t'empêche. Sans l'indispensable, l'incontournable et l'obligatoire qui te ramènent sans cesse au rivage.

On savoure alors cette joie profonde de se savoir mortel en ce monde qui freine ou se déchaine sans réfléchir et le plus souvent en hurlant. Il y a la fuite et les retours incessants mais au bout ce grand voyage pour tout le monde. 

Attendre comme ça, au détour d'une route, à l'amorce d'un chemin, c'est comme une accolade fraternelle avec cet inconnu d'où nous avons jailli et vers lequel nous retournons. Tout ce que le silence a à nous proposer c'est nous.

C'est pour ça.

Ne rien faire, parfois, nous sauve. 

 

 

 

 

 

 

 

Ça tombe en vrac, ça ne remonte pas le moral mais à la fin c'est Jean-pierre qui a raison

 

 

J'ai pris mon café.

Je m'installe.

L'écran s'allume.

Je commence toujours par prendre la température.

 

Il est question d'abominations, de fureur, d'horreur et de guerre. On nous parle de pauses humanitaires minimalistes et d'asile climatique. Il est question de marches ou d'offensives solitaires. D'un singe chimérique né dans un laboratoire chinois et de ces alertes à la pollution de l'eau du robinet qui se multiplient en France.

Tiens, c'est aujourd'hui qu'est dispo sur Netflix The Killer, le nouveau Fincher. À voir et à chroniquer mais, franchement, l'envie d'écrire sur le cinoche se dérobe de plus en plus. Hier soir j'ai démarré une dizaine de programmes que je quittais au bout de quelques minutes. J'ai fini par faire un Scrabble sur i-phone, le cerveau essoré de clichés, effets lessivés, scénars boiteux et autres sensibleries glaçantes de naïveté. Malgré tout, ce nouveau Fincher sent le trip aussi épuré et radical. Encore une leçon de nihilisme servie glacée.

Le cinéma n'est pas mort. Le dernier Scorsese, Killers of the Flower Moon m'a emmené au fond du gouffre et le dernier Wes Anderson, Astéroid City,  convoque l'artisanat poétique originel de la mécanique cinématographique. Le cinéma n'est pas mort. Le cinéma ne peut pas mourir et ne doit pas mourir. Ses magiciens les plus sensibles continuent de lancer leurs étoiles filantes contre l'éther.

 

Je poursuis ma lecture.

Il est question du parcours de la flamme paralympique et un peu plus bas de restitution de biens mal acquis. Du budget consacré à l'aide à l'Ukraine et du Pas-de-Calais inondé. De la loi relative à l'immigration et des congés payés pour les salariés malades. De la lutte contre les activités minières illégales et de ces députés proches du Qatar qui ont omis de déclarer à l’Assemblée nationale des déplacements et des invitations aux frais de l’émirat. Là un réanimateur de centres commerciaux en détresse et ici un orphelin de Marioupol déporté en Russie. Le permis en carton rose qui se liquéfie dans mon portefeuille ne sera plus valable en 2033. Les allemands seraient prêts à travailler plus longtemps pour sauver leur économie. Après le vent et la pluie le grand froid se pointe. Je lis qu'un oeil complet a été greffé pour la première fois.

 

Ça sonne à la porte.

C'est le réparateur de la machine à laver. On l'a attendu 15 jours.

Il est sympa mais il ne va rien réparer du tout.

"C'est la résistance séchage qui a lâché"

Le temps de commander la pièce et de retrouver un créneau pour réparer. il faut compter quinze jours supplémentaires. Rester calme et mesuré c'est aussi ça être digne. J'improvise une lessive à la main dans la baignoire. J'étends le tout sur les radiateurs puis je regarde la pluie arroser le jardin. D'une déconvenue je viens d'élaborer une leçon d'apprentissage de la patience. La vérité c'est que je suis de nouveau calme mais profondément déprimé. Lumière de plomb. Jour triste. J'ai même fait faux bond à mes potes qui m'invitaient à bouffer ce midi. Je reste un être pudique et aujourd'hui, je suis infréquentable. Évidement, la panne de la machine à laver n'a rien à voir là-dedans.

Même Scott ne quitte pas son panier.

Monte alors de ma playlist la musique de Morricone. Celle d'Il était une fois en Amérique. La mélancolie; c'est comme la marée. Je pense aux absents puis à mon vieux lévrier qui plus d'un an après me manque toujours autant. Quand on se balade avec Puce en forêt il m'arrive encore de l'entendre cavaler dans mon dos. Cette tristesse là compte parmi les douceurs et les surprises de l'existence. Éprouver un amour infini pour un chien trauma un peu con mais au regard bouleversant. Le réparer, lui redonner confiance, s'en occuper dix ans pour finir par le déposer dans une jolie boite sur le piano. Je n'arrive pas à me séparer de ses cendres. J'ai le sentiment que c'est ce qu'il souhaiterait. Val était un vrai pot de colle.

 

Retour à l'écran.

Un nouveau film sur l'abbé Pierre. Pourquoi pas. Il passe au multiplexe à côté.

Les articles défilent. Je me dis qu'il faut absolument que je poursuive la lecture de mon bouquin sur l'essor incontrôlé de l'intelligence artificielle sans oublier d'aller promener le chien avant qu'il pleuve... Prévoir l'avenir et faire pisser ses animaux domestiques constituent deux activités essentielles.

Retour aux articles.

En France, un garde des sceaux se présente devant la justice sans avoir avoir eu la politesse de démissionner. Il y a cette marche contre l'antisémitisme faisant fi des barrières politiques mais qui, déjà, divise (elle sera sans président et loin, au final, d'être la vitrine d'un pays riche de ses métissages).

Ici je lis la honte ressentie par d'anciens harceleurs scolaires aujourd'hui adultes. On me parle aussi des bombes carbone et des laboratoires de Fentanyl mexicains dont l'argent ira blanchir dans les hautes tours de Dubaï. Du projet de création d'une nouvelle autorité de sûreté nucléaire. Du Prince Harry ferraillant vaillamment contre les publications malodorantes des tabloïds britanniques. Des Géorgiens qui célèbrent le rapprochement avec l'union européenne et enfin de la fin de la grève des acteurs à Hollywood après 4 mois de conflit.

Une info qui me fait retourner aux contes et aux images.

Je bascule, donc, sur vidéos, sites et blogs cinoche.

Je découvre la bande-annonce prometteuse de Masters of the Air, la nouvelle série hommage aux soldats de la seconde guerre mondiale produite par Spielberg après les superbes Band of Brothers et The Pacific. C'est tout joli mais la sensation de déjà-vu s'impose et les effets numériques creusent la distance avec l'effet de réalité des deux premiers opus.

Encore un article sur Christopher Nolan dépeint comme  un des derniers résistants du grand écran face à la logique du streaming et des plateformes. Noble combat perdu d'avance. La preuve avec cet article sur Disney. En difficulté, l'empire centenaire du divertissement aujourd'hui vacillant pourrait vendre quelques films et séries à Netflix. La révolution est plus qu'en marche, nous la consommons toutes et tous avec abandon. The Killer, Napoleon, Maestro le grand cinéma populaire qui attise  ma curiosité est aujourd'hui produit par les plateformes.

Restent quelques sursauts du monde ancien. Je termine d'ailleurs de surfer sur cette nouvelle : le nouveau Miyasaki, Le Garçon et le Héron, s'est installé en tête du box-office France avec plus de 700 000 entrées pour sa première semaine en salles.

Et si Jean Pierre Siméon avait raison? 

La poésie sauvera le monde.

Un court instant

 

 

 

Un court instant

 

 

Un court instant,

c'est le temps de présence de l'humanité sur notre planète depuis sa création.

Mais la poésie a toujours été.

 

Le monde d'avant l'homme condensait le poème ultime.

 Le monde d'après l'homme condensera le poème ultime.

Silencieux, venteux, rugissant,

pluvieux, enneigé ou gorgé de soleil,

écrivant son roman sur le sable des marées

dressant ses montagnes et forêts

s'oubliant dans ses gorges et ravins

caressant les prairies

chuchotant au coeur du désert

La gigantesque ménagerie du ciel et de la terre brasse le décor et le chante.

 

La Terre tourne.

Poètesse ronde et bleue

libérée de tous les mots.

 

 

 

 

 Pavarotti

 

 

Luciano chante Mamma à plein poumon

dans mes écouteurs.

Quelle puissance!

quel élan!

Voilà que je redeviens

immortel.

Le paradoxe

avec Pavarotti,

c'est que l'on éprouve la sensation de perdre du poids en l'écoutant.

 

Léger

Tout en moi entre en fête et j'accélère le pas. 

Scott trottine de plus belle

et les feuilles d'automne dansent autour de lui.

Qu'il s'arrête pisser et aussitôt

le microcosmos à ses pieds étincelle. 

 

Les passants se mettent à avoir

des têtes sympas. 

Les klaxons tintent joyeusement. 

Le tramway

chante

sur les rails humides. 

Je peux grimper l'escalier de la cathédrale sans m'essouffler.

survoler les pavés de la cité médiévale.

Il fait un temps de chiotte

mais peu importe. 

Pavarotti est à mes côtés.

Colosse à l'épreuve du gris de l'hiver.

Ce mec

c'est Noël.

 

Demain

cela fera pile un mois que j'ai fumé ma dernière

clope

et je pourrais moi aussi me mettre à chanter à gorge déployée sans tousser. J'ignore combien de temps je vais tenir

mais

ça m'amuse de compter les jours.

 

C'est dérisoire mais à chacun ses victoires.

Niquer une addiction,

même temporairement,

flatte le guerrier qui roupille en nous. 

Mais pour l'instant,

le King,

c'est Pavarotti.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Prochainement piste 6

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27/09/2023
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