LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

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GAUGUIN, VOYAGE DE TAHITI

Portrait    biopic fiévreux

Edouard Deluc

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Ailleurs.

Il y a quelque chose de profondément libre dans le Gauguin d’Edouard Deluc.
Une belle sensation de lâcher-prise, de refus de l’historique, du didactique et de l’empesé. Une langueur bienvenue. Une forme d'errance éclairée qui, à défaut d’être sauvage de bout en bout, libère de vrais instants de cinéma ample et tout entier offerts à la sensation.

 

Autopsie d'un coeur et d'une âme malade puisant une matière neuve dans l'abandon à une culture première, ce voyage de Tahiti librement inspiré des écrits du peintre (notamment son court récit Noa Noa) ne cherche à aucun moment à tutoyer une quelconque vérité historique. Il traduit avec justesse le parcours paradoxal d'un accomplissement artistique absolu doublé d'un naufrage physique et moral. L'illusoire mariage de deux cultures que tout oppose ne s'accomplira que dans la transcendance artistique. L'artiste se réalise tandis que l'homme se perd et se meurt...

 

 

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Visuellement cette danse éperdue du profane au sacré est parfaitement restituée par la photographie naturaliste de Pierre Cottereau. Point d'azur radieux ni de débauches de couleurs, le paysage affiche ses splendeurs mais sans fards. Même si les instants de grâce et d'éblouissement trouvent aussi leur place. Certains plans édéniques évoquent sans se cacher l'aérien premier chapitre de La Ligne Rouge de Terrence Malick.


Et tout cela a fonctionné pour moi grâce, comment ne pas le préciser, à la magnétique présence de Vincent Cassel. Gris, Barbu et regard hanté il tient solidement son portrait de l’artiste en exil. Même si je rencontre toujours avec lui ce petit soucis d'élocution qui lui bouffe parfois un peu ses dialogues cette rudesse sied bien à ce personnage sans concession. Cassel tient son Gauguin et il le tient bien. Sa prestation résonne même, pour moi, en écho avec celle, juste et dépouillée, de Jacques Dutronc dans le rude et noble Van Gogh de Pialat.


Je salue l'ambition d'une production française qui n'a pas peur de s'exiler pour aller taquiner du grand cinéma.  Je salue le courage d'Edouard Deluc et ses scénaristes d'avoir approché la légende, évoqué sa part d'ombre sans jamais dégringoler dans un sordide qui aurait privé l'oeuvre de ses ailes. Ils ont réussi un petit miracle. Fuir le biopic, partir en rêverie, respecter le mythe Gauguin et évoquer au final le Lord Jim de Conrad. Le parcours aventureux mais déceptif d'un homme sans cesse rattrapé par ses fantômes. Du vrai cinéma d'auteur respirant l'air du grand large. Un geste cinématographique qui mérite le respect et trouvera certainement sa place avec le temps parmi les plus grands films évoquant les géants de l'Art. Ce Gauguin ressemble à son modèle. Il a de l'ambition, des couilles et du souffle. Ce Gauguin en fera sans doute chier certains, en bousculera d'autres, mais il vole avec élégance au-dessus du tout-venant.

 

 

Francisco,

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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2017

 

1H40

 

 

LE BLU-RAY      Peut-être moins coloré qu'attendu mais l'esthétique est raccord au propos et la haute précision joue plein autant sur les visages que les paysages. Du beau travail!

 

 

 

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Writers:

(screenplay), (screenplay) | 3 more credits »

 

 

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04/02/2018
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