LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

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THE TOWN, Spinaltap est sensible aux traditions familiales

Polar                                             

Ben Affleck 

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Dans beaucoup de villes, des métiers se sont transmis de père en fils durant des décennies, soit en fonction de la situation géographique comme pour les mineurs ou les dockers, soit en raison d'une filiation historique plus noble comme pour les maréchaux-ferrants, les souffleurs de verre ou encore les tenanciers de bordel. A Charlestown, petit quartier populaire de Boston, la spécialité locale c'est le braquage, pratiqué généralement entre amis d'enfance.

 

 

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Une tradition familiale particulièrement respectée puisque cette péninsule détient le record de braquos au km2. Ici, une des premières choses qu'un gosse apprend, c'est reconnaître une voiture du F.B.I. à la longueur de son antenne.

Ces gars sont de vrais pros, capables de trier les liasses de billets piégées aussi facilement que Larry Bird enquillait les shoots à 3 points lors des matchs des Celtics, tout en entretenant le contact avec le "client" avec un généreux coup de crosse de fusil à pompe sur le coin de la tronche. Le souci de Doug (Ben Affleck) et de son gang local, c'est que l'otage qu'ils ont relâché - Claire Keesey, la directrice de la dernière banque attaquée - vit aussi dans le coin et qu'elle a repéré un tatouage sur la nuque de Jem (Jeremy Renner) pendant le casse. Et comme la demoiselle, témoin principal de la police, est célibataire et séduisante (Rebecca Hall), le beau Doug se charge d'effectuer une surveillance très rapprochée, quitte à se faire griller, façon Icare, vous savez le mec avec des ailes qui a volé un peu trop près du soleil (un soupçon de mythologie de temps en temps ne fait pas de mal).

Et puis soyons lucides, on sait tous, notamment depuis "Heat", qu'une relation stable et durable n'est pas très compatible avec cette profession qui offre des perspectives d'avenir relativement floues.

 

 

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Heat, parlons-en car c'est de toute évidence l'influence majeure du deuxième long-métrage réalisé par Ben Affleck, dans sa construction comme dans son énorme séquence de fusillade. Mais si il assume clairement de marcher dans les pas du géant, il prend aussi soin de garder une distance de sécurité afin de ne pas avancer dans l'ombre immense d'un tel mastodonte.

 

On peut en particulier apercevoir un clin d'oeil au film dans une scène ajoutée dans la version longue (25 mn de plus, à privilégier absolument plutôt que la version ciné) proposée sur ce blu-ray uniquement en VO (et c'est tant mieux!): une image furtive du chef-d'oeuvre de Michael Mann passant sur la TV que regarde Doug un soir chez lui, hommage glissé par le réalisateur/acteur comme s'il nous avouait qu'il préférait rester dans la position de l'admirateur plutôt qu'essayer vainement de dépasser un monument qu'on peut référencer comme le polar ultime depuis 1995.

 

C'est peut-être aussi pour cette raison qu'il n'a pas confié le rôle principal à un poids lourd du cinéma américain, se chargeant lui-même de la tâche, tout en offrant le rôle du flic obstiné, sensiblement mois développé que dans Heat, à John Hamm, peu exploité sur grand écran et surtout connu des fans de Mad Men. Une façon de se démarquer humblement du duel icônique De Niro/Pacino. Ce sont en fait les personnages qui ont influencé le destin de Doug qui auraient mérité d'être davantage étoffés, d'autant plus que le casting réuni pour ces seconds rôles est absolument impeccable: Jeremy Renner, fidèle pote d'enfance et malfrat badass, Blake Lively, ex-girlfriend et mère célibataire junkie, Chris Cooper, paternel taulard qui s'attend à voir son fils le rejoindre derrière les barreaux, et feu Pete Postlethwaite, fantastique gueule cassée à l'accent inimitable, dans son avant-dernier rôle (il était alors bouffé par le cancer), celui d'un fleuriste organisateur de casses et véritable ordure.

 

 

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L'intrigue, adaptée du livre Prince of thieves de Chuck Hogan, se concentre surtout sur la difficulté de Doug à s'affranchir de son passé et de son quartier à travers une relation amoureuse vouée à l'échec. La démarche est cohérente puisque Affleck a passé une grosse partie de son enfance à Boston (qui était déjà le cadre de Gone baby gone, son premier long-métrage) et donne à The Town, le surnom de Charlestown, le vrai premier rôle. Un quartier enclavé désormais touché comme son personnage par une dualité: d'un côté un secteur résidentiel investi ces dernières années par des yuppies comme Claire Keesey, qu'on surnomme ici les "toonies" en opposition aux "townies", les natifs de Boston qui vivent côté vieille cité ouvrière, là où les liens tissés à travers la rudesse sociale sont aussi forts que les conséquences qu'ils peuvent avoir sur une vie et où on déconne pas avec la loyauté. Une communauté à laquelle on est fiers d'appartenir même si les racines du mal peuvent vous y enterrer, que ce soit entre quatre murs ou entre quatre planches.


- I need your help. I can't tell you what it is, you can never ask me about it later and we're gonna hurt some people.
- Whose car are we gonna take?


Dans ce milieu, l'amitié consiste entre autre à accepter de filer un coup de main pour un truc chelou sans moufter. Affleck, tout en assurant le job devant l'objectif, se plaît à mettre en scène d'authentiques "townies" dans des petits rôles et surtout à shooter de purs gunfights dans une ville qu'il connaît comme sa poche.

 

Caméra à l'épaule au coeur de l'action, plans aériens situant les protagonistes dans l'espace, découpage nerveux mais pas épileptique, avec l'aide du réalisateur de seconde équipe Alexander Witt, un habitué des blockbusters d'action haut-de-gamme (La chute du faucon noir, Casino Royale, X-Men-Le commencement, Skyfall), il nous plonge dans un affrontement urbain fichtrement bien troussé et qui a le mérite de rester d'un remarquable réalisme, nous embarquant notamment dans un trépidant braquage de fourgon blindé suivi d'une poursuite automobile dans ces rues étroites typiques bordées de maisons aux briques rouges. Pas de méga-explosions gonflées au numérique ici, ni de super-flics posant sa grosse paire de burnes sur l'autel de l'inconscience, comme l'illustre cette géniale rupture de rythme: quelques interminables secondes de silence pendant lesquelles un représentant de la loi stationnant dans son véhicule de fonction se retrouve par hasard face aux quatre braqueurs lourdement artillés débarquant de leur caisse et le dévisageant à travers leurs déguisements de vieilles nonnes.

 

 

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On apprécie aussi cet art du travail bien fait grâce à la contribution d'une autre pointure, Robert Elswit, fidèle directeur photo de Paul Thomas Anderson ayant récemment travaillé sur Night Call et Mission Impossible 5, qui nous façonne ici une image froide et âpre comme une matinée hivernale dans le Massachusetts. Un apport d'autant plus appréciable que cette édition HD est de fort belle facture, parfaite alliance d'un joli grain ciné et d'un piqué aussi saisissant sur les gros plans de visage (à quelques exceptions près) que sur les vues aériennes de la ville


Sachant comme il se doit s'entourer des meilleurs, celui qui était régulièrement moqué pour ses dispositions de comédien - OK ce gars ne sera jamais Daniel Day-Lewis ou Joaquin Phoenix mais c'est loin d'être une quiche quand même - aura su gagné sa légitimité en passant derrière la caméra pour donner corps à un penchant du meilleur goût pour le polar tendu et chiadé. Une légitimité définitivement acquise avec l'Oscar du meilleur film remporté en 2013 avec l'excellent Argo, son troisième effort.

Respect.

 

 

Spinaltap,

 

 

 

 

 

 

Ben's world

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2010

 

2H05 / 2H30 (version longue)

 

 

LE BLU-RAY           Une édition HD de fort belle facture, parfaite alliance d'un joli grain ciné et d'un piqué aussi saisissant sur les gros plans de visage (à quelques exceptions près) que sur les vues aériennes de la ville. Une image Blu-ray de caractère et bien charpentée.

 

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03/10/2015
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